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La
Récit
[…]
«Comment ele fu ranprosnee
De la ducoise et disfamee;
Comment ele vint en sa canbre
Qui toute estoit ovree a lanbre;
Comment desperance le mort
Que
ele s'en livra a mort;
Cornent li cevaliers gentieus,
Qui tant ert sages et soutieus,
Ne vit s'amie a la carole.
Sans faire plus longe parole
A le cambre s'en est venus,
Qui toute ert faite d'ebenus;
Comment le rice branc d'acier
Se
fist parmi le cors glacier.
S'ores
com une pucelete
Qui
se dormoit en le cambrete,
S'esvilla
quant oï la noise;
El
palais vint, pas ne s'acoise.
S'ores
comment ele cria
Au duc com grant dolor ci a:
Sire,
par le foi que vos doi,
En no cambre sont mort andoi
Vo
nieche qui tant estoit bele,
Et
cil qui amoit la pucele; (vers 76)
Comment
li dus, qui fu vasaus,
Vint
en la cambre, les grans saus;
Cornent
il revint el palais
A tout
s'espee, a grant eslais,
La
ducoise en coupa la teste:
Adont fu tourblee la feste!
S'ores
comment se desprisa
Li dus,
comment le crois prise a;
Comment
outre mer va servir
Dieu,
por sa grase deservir.
Jhesucris
nos doinst par sa grase
De vivre
el monde tant d'espace,
Et
si nos caroungnes monder
Et
nos pecies tous esmonder
C'o
lui soions es cieus enclos
Quant
mors nos ara les iex clos.
Ce
résumé de Perrot de Neele nous rend assez bien l'histoire de La Chastelaine
de Vergi; le poète a ajouté très peu de détails (par exemple dans la
description de la chambre où la Châtelaine se retire) et n'introduit qu'un seul
changement qui puisse donner à réfléchir: au vers 76 il s'est servi du mot pucele pour désigner la
Châtelaine; est-ce par excès de pudeur, n'osant plus admettre que
l'amour du
chevalier s'adresse à une femme mariée? L'on sait
d'ailleurs que Marguerite de Navarre a introduit un changement comparable dans
sa version de cette histoire: selon elle la Châtelaine est veuve depuis au
moins sept ans déjà. En ce qui concerne les sources de cette nouvelle, nous
pouvons rappeler les rapprochements faits avec plusieurs lais ou contes du
douzième siècle, à savoir: Graelent, Lanval, Guingamor de Marie de
France, Pyrame et Thisbé; on pourrait ajouter encore un lai de Marie de
France: Le Lai des dous amanz. Une étude exhaustive des sources de La
Chastelaine de Vergi (surtout en rapport avec les Lais de Marie de
France) fait toujours défaut.
Parmi toutes les adaptations anciennes et modernes de
la ChV il en est deux qui nous intéressent plus spécialement, étant
contemporaines de la plupart des versions françaises. Ce sont les deux versions
anonymes en moyen-néerlandais, datant du XIVe siècle. Le copiste de la version
néerlandaise qui se trouve dans le célèbre de Hulthem, et que nous appellerons
NH3 pour le distinguer d'avec le H du texte français, a eu soin de dater sa
copie avec exactitude; (On pourrait
traduire ces vers pleins de chevilles de la façon suivante:
Sachez en
fine vérité
Que ce
texte était prêt
Le 24e jour
de mai,
Lorsqu'on
eut l'an du Seigneur
.m.ccc,
sachez le bien,
Et il faut
y ajouter)
Le texte, qui nous donne l'histoire complète telle
qu'elle se trouve dans les mss français, est nettement plus long que le texte
français: dans la version A celui-ci compte 948 vers, NH en a 1127. Le second texte
néerlandais est seulement un fragment qui ne nous donne que 502 vers, dont une
centaine de mutilés, le ms. ayant servi comme couverture d'une liasse de
comptes. Le ms., que l'on date du XIVe siècle, a été découvert en 1838 aux
Archives d'Ypres. Les vers conservés dans ce fragment (qui se trouve à la
Bibliothèque de l'Université de Gand, d'où notre sigle NG), correspondent aux
vers 118-209 et 307-721 du texte de A; ceci fait donc dans le texte français un
total de 507 vers. La longueur des passages correspondants dans les deux textes
est donc égale: une différence de 5 vers sur 500 peut être négligée. Il est
donc évident qu'il doit y avoir des différences assez importantes entre les
deux textes néerlandais». In René Ernst Victor Stuip, La Chastelaine de Vergi, Edition critique du ms. b.n.f.fr. 375 avec
introduction, notes, glossaire et index, suivie de l'édition diplomatique de
tous les manuscrits connus du xiii et du xiv siècle, Promotor L.
Geschiere, Academisch Proefschrift, Mouton,
The Hague Paris, 1970.
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